Quant ça ne veut pas... un semi à grand'peine

 (Petit compte rendu d'une course datant de... début juin! Mais comme j'ai fini par l'écrire et je vous le livre)

Pourtant je m'en réjouissais de ce semi marathon, malgré l'annonce d'une météo exécrable. Et malgré d'autres signes que je n'ai pas su écouter... comme la sensation de se réveiller chaque matin plus fatiguée... J'avais fait "tout juste" ou presque, mettant la pédale douce sur le sport (et sur l'intensité) la semaine avant. Bon d'accord, participer à un pot de départ et me rentrer à minuit et demi la veille de la course, ce n'était pas non plus une bonne idée.

Le jour J, donc, j'émerge avant le réveil. Mon horloge biologique sonne 6h00, rien à faire. Je suis tentée de me rendormir, mais pas le temps pour une phase complète de sommeil. Plus tard dans la matinée, lorsque j'apprendrai que je suis arrivée en avance pour rien, car pour les préinscrits le dossard se retire en début d'après-midi au départ de la course (et non à l'arrivée où se trouvent les vestiaires et d'où un bus nous achemine), je ferai une drôle de tête: si j'avais su j'aurais pu me rendormir!

Sans me laisser démoraliser par une météo pluvieuse et froide (8°C grand maximum), me voici partie pour deux heures de trajet vers  une région chère à mon coeur, et avec une grande envie de courir un semi-marathon en forêt. Pour moi c'est à la fois une belle course dans une région magnifique, et un test pour un semi de montagne que je prévois de courir un mois plus tard.

Qu'ai-je fait de mes jambes?

Dans le bus qui nous mène au départ, mon voisin est sympathique et intarissable: on devise comme deux vieilles connaissances. La température et le mauvais temps aidant, nous ne sommes que quelques dizaines de participants et tous (sauf moi) sont taillés comme des champions. ça promet. Pourtant, à ce stade, j'ai encore confiance. Au départ, nous trouvons asile dans le bistrot du coin et nous nous réchauffons autour d'un thé ou d'un café, tant pis pour l'échauffement. Je tente de mettre ma Garmin en marche: que pouic. Bon, je courrai sans montre. Et si ça a avait été un signe?

Le départ est donné. Je m'élance parmi les derniers et j'ai tôt fait de me faire dépasser par les rares personnes qui sont derrière moi. C'est-à-dire que "je m'élance" tient bien plus d'une figure de style que la réalité: je voudrais courir, mais "ça" ne veut pas. Pas de jambes. Lourdes, douloureuses, et un sentiment d'intense fatigue. Une panne de moteur. Pas de jus sous le capot. Impossible de desserrer le frein à main.

Abandonner peut-être

Au 2e kilomètre, un organisateur nous fait quitter la route pour un chemin de terre, longeant magnifiquement la rivière. A la vue de la camionnette, j'hésite à arrêter là les frais. "Et puis non", je me dis. "T'es quand même pas venue jusqu'ici pour courir que 2 km!" Je décide de tenter de faire au moins les 7 premiers kilomètres, histoire de profiter du beau panorama le long de la rivière.

Descente dans la terre grasse, c'est détrempé, plein de pierres qui roulent et de racines. Au loin, je vois disparaître le t-shirt blanc de la dernière du groupe que je suivais. Je vais donc courir 21 km seule, et je suis la dernière. Bon, finir dernier du classement n'a, sauf exception, jamais tué personne. J'essaie de positiver et de savourer le paysage. Et c'est vrai qu'il est splendide, dans un dégradé de verts profonds et émeraude, entre forêt amazonienne et Jura.

Les km ne sont pas marqués, je n'ai donc aucune référence, vu ma panne de montre. Il y a tout de même un panneau au 5e kil. A ma montre "normale", que j'ai eu la présence d'esprit d'emporter, il y a environ 30 minutes que je cours. Je me dis que ce n'est pas si mal, dans cet état de méforme. Au 7e km, je me sens soudain un peu mieux. J'ai trouvé un rythme de croisière d'escargote asthmatique. Je m'arrête au ravitaillement pour boire un peu et je repars.

Le grand arrosage

La suite? Un long calvaire. Je ne cesse de ralentir. Tiens, je ferais bien une sieste. J'ai mal au ventre. "C'est sûr, au prochain ravitaillement j'abandonne," me dis-je. Qu'il est long le chemin entre le 7e et le 10e km que j'appelle de mes voeux et qui ne vient pas! Ils ont oublié de mettre le panneau ou quoi? Là je dois être au 11e au moins! Non, le voilà, le fameux panneau. Je passe le 10e en environ 1h05. Et c'est sûr, je vais abandonner.

Sauf que. Entre le 10e et... la suite, je passe par un endroit extraordinaire. Il a tellement plu que cette portion habituellement humide est cette fois complètement détrempée. Des litres d'eau se déversent en cascade sur ma tronche, depuis la falaise en surplomb. Le chemin est un véritable ruisseau et du haut des rochers des paquets d'eau m'aspergent, comme si des lutins perchés dans les falaises se faisaient un malin plaisir à me balancer une multitude de seaux d'eau plein la figure. Je ruisselle, mes godasses sont lourdes de flotte... et je suis morte de rire. Je rigole tellement d'ailleurs, que je me retrouve soudain devant le panneau du 14e km, "ravitaillement". Déjà? Encore un coup des lutins!

 Et si je terminais quand même?

J'ai donc fait les deux tiers, je dois être capable de faire la suite. On verra bien. Je prends un sucre de raisins et je repars tout lentement. Le parcours est légèrement modifié. Au lieu de redescendre vers la rivière et de remonter (risque d'éboulement), je poursuis ma route sur un large chemin forestier en légère descente. Y'a qu'à se laisser rouler... enfin, en temps normal, car j'avance avec peine, toujours ce mal au ventre (en plus j'ai pris de la boisson isotonique par erreur, ce qui n'améliore rien).

Dernier ravitaillement au 18e (en réalité ça doit être le 17e vu le changement de parcours) avant une montée. Je m'attends à une monstrueuse montée et je ralentis. La fameuse montée n'est toujours pas en vue alors que je vois "dernier km" sur un panneau: je n'arrive pas à y croire et ralentis encore en attendant l'énorme pente ... eh bien celle-là je l'attends toujours! J'ai oublié que malgré l'état de méforme et de fatigue où je suis, on peut dire que je suis entraînée aux montées, cette saison.

Je passe la ligne d'arrivée longtemps après tout le monde. Suis-je fière d'être allée au bout? Même pas, car j'aurais tout aussi bien pu abandonner: les deux choix se tenaient et tout s'est décidé à un cheveu. Si j'ai continué, c'est avant tout pour les magnifiques paysages et grâce aux éclats de rire sous les rochers qui pleuvaient comme vache qui pisse. De la course en elle-même, je ne retire aucune fierté, même pas celle d'être allée au bout. Mon temps? Je n'en ai aucune idée car je n'ai pas regardé ma montre en arrivant et le classement n'a pas été publié.

Epilogue

Une bonne demi-heure après-moi, deux coureurs ont franchi le portique. Tiens, je n'étais donc pas la dernière.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

La notion de "repos"

Courir c'est apprendre à oser

Le Marathon m'a appris à courir sous la pluie